Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/366

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Maxime savait jouir de son heureuse situation. L’injure qu’il avait reçue de Valentinien paraît suffisante pour excuser la plus sanglante vengeance. Cependant un philosophe aurait pu réfléchir que la chasteté de sa femme était intacte, si sa résistance avait été sincère, et que rien ne pouvait la lui rendre, en supposant qu’elle eût consenti au désir de son corrupteur. Un patriote aurait hésité à se plonger lui-même et son pays dans les calamités qui devaient être les suites inévitables de l’extinction de la maison impériale. Maxime négligea imprudemment ces considérations ; il satisfit son ambition et sa vengeance ; il vit expirer à ses pieds le coupable Valentinien, et fut séduit par la voix du peuple et du sénat qui l’appelaient à l’empire ; mais son bonheur finit avec la cérémonie de son inauguration. Emprisonné dans son palais, selon les énergiques expressions de Sidonius, et après y avoir vainement cherché le sommeil, il se leva en soupirant d’avoir atteint le but de ses désirs, et n’aspira plus qu’à descendre du poste dangereux où il s’était élevé. Accablé du poids de son diadème, il confia ses tristes réflexions à Fulgentius, son ami et son questeur ; et rappelant les plaisirs sereins de sa vie passée : « Ô fortuné Damoclès[1],

  1. Districtus ensis cui super impiâ
    Cervice pendet, non Siculæ dapes
    Dulcem eluborabunt saporem :
    Non avium citharæque cantus
    Somnum reducent.

        Horac., Carmen, III, I.

    Sidonius termine sa lettre par l’histoire de Damoclès, que