Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/37

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

vivacité à chaque action, à chaque parole de leur immortel patron, qui contemplent avec ravissement les colonnes de marbre, les couleurs variées du pavé des appartemens, et qui font continuellement l’éloge d’un faste et d’une élégance que celui auquel ils l’adressent est accoutumé à considérer comme une partie de son mérite personnel. Aux tables des Romains, les oiseaux, les loirs[1] ou les poissons dont la taille excède la grandeur ordinaire, excitent la plus sérieuse attention : on apporte des balances pour s’assurer du poids ; et, tandis que quelques convives plus sensés détournent leurs regards de cette fastidieuse répétition, des notaires sont mandés et viennent dresser un procès-verbal de ce merveilleux événement. La profession de joueur est encore un moyen sûr de s’introduire dans la familiarité des grands. Les confédérés sont unis par un lien indissoluble d’attachement, ou plutôt par une sorte de conspiration ;

  1. En latin glis, et loir en français. Ce petit animal habite dans les bois, et paraît privé de mouvement dans les froids rigoureux. Voyez Pline, Hist. nat., t. VIII, p. 82 ; Buffon, Hist. nat., t. VIII, p. 158 ; et l’Abrégé de Pennant sur les quadrupèdes, p. 289. On s’occupait dans les maisons de campagne d’élever et d’engraisser une grande quantité de glires ou loirs, et on en faisait un article d’économie très-lucratif (Varron, De re rusticâ, III, 15.). Ce mets fut plus recherché dans les tables somptueuses, depuis la défense ridicule des censeurs. On assure qu’on en fait encore grand cas aujourd’hui à Rome, et que les princes de la maison des Colonnes en font souvent des présens. Voyez Brotier, le dernier éditeur de Pline, t. II, p. 458, apud Barbou, 1779.