Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/400

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le port, toute prête à faire voile[1]. Dans des circonstances moins favorables, Majorien égala le courage et la persévérance des anciens Romains. On abattit les bois de l’Apennin ; on rétablit les arsenaux et les manufactures de Misène et de Ravenne. L’Italie et la Gaule contribuèrent à l’envi, et la flotte impériale, composée de trois cents fortes galères et d’un nombre proportionné de moindres navires et de bâtimens de transport, se rassembla dans le port vaste et sûr de Carthagène en Espagne[2]. Les soldats de Majorien, animés par l’intrépidité de leur général, ne doutaient plus de la victoire ; et si l’on peut en croire l’historien Procope, l’empereur se laissait quelquefois emporter par son courage au-delà des bornes de la prudence. Curieux d’examiner par lui-même la situation des Vandales, il se hasarda, en déguisant la couleur de ses cheveux, d’entrer dans Carthage sous le nom de son ambassadeur ; et Genseric, lorsqu’il en fut instruit, regretta vivement d’avoir laissé échapper l’empereur des Romains. Cette anecdote

  1. Florus (l. II, c. 2) se plaît à supposer poétiquement que les arbres furent métamorphosés en vaisseaux ; et réellement le fait, tel qu’il est raconté dans le premier livre de Polybe, s’éloigne trop du cours ordinaire des choses.
  2. Interea duplici texis dum littore classem
    Inferno superoque mari, cedit omnis in æquor
    Silva tibi
    ,
    etc.

        Sidon., Panegyr. de Major., 441-461.

    Le nombre de vaisseaux que Priscus fixe à trois cents, a été enflé par une vague comparaison avec les flottes de Xerxès, d’Agamemnon et d’Auguste.