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de la terre dans les froides et sombres régions du Nord[1].

Effets de leur conversion.

Le christianisme en même temps qu’il ouvrit aux Barbares les portes du ciel, opéra une grande révolution dans leur état moral et politique. Ils acquirent l’usage des lettres, si essentiel à une religion dont la doctrine est contenue dans un livre sacré ; et en étudiant les vérités divines, leur esprit s’agrandissait par la connaissance de l’histoire, de la nature, des arts et de la société. La traduction de la sainte Écriture dans leur langue nationale, après avoir facilité leur conversion, put donner à leur clergé l’envie de lire le texte original, de comprendre la liturgie de l’Église, et d’examiner dans les écrits des Pères, la chaîne de la tradition ecclésiastique. Ces dons spirituels se conservaient dans les langues grecque et latine, qui recelaient les monumens inestimables des anciennes lumières. Les productions immortelles de Virgile, de Cicéron et de Tite-Live, devinrent accessibles aux chrétiens barbares, et établirent silencieusement, à travers les générations, une sorte de commerce entre le règne d’Auguste et les temps de Clovis et de Charlemagne. Le souvenir d’un état plus parfait alluma l’émulation des hommes, et le feu sacré de la science se conserva en secret pour

  1. L’épée de Charlemagne ajouta du poids à cet argument ; mais lorsque Daniel écrivit cette épître (A. D. 723), les mahométans, dont les possessions s’étendaient depuis l’Inde jusqu’en Espagne, auraient pu le rétorquer contre les chrétiens.