Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/522

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et ignorans successeurs d’Ulphilas[1]. Le sentiment de leur supériorité aurait dû les mettre au-dessus des artifices et des petites passions de la guerre théologique ; cependant les écrivains orthodoxes, séduits par la certitude de l’impunité, eurent la faiblesse de composer des fictions auxquelles on ne peut guère donner d’autre nom que celui de fraude et d’imposture. Ils attribuèrent leurs propres ouvrages aux plus respectables écrivains de l’antiquité chrétienne. Vigile et ses disciples contrefirent maladroitement saint Athanase et saint Augustin[2], et leur école[3]

  1. Fulgence, évêque de Ruspæ, dans la province de la Bysacène, descendait d’une famille de sénateurs, et avait reçu une éducation soignée : il savait Homère et Ménandre par cœur avant qu’on lui permît d’apprendre le latin, la langue de son pays. (Vit. Fulgent., c. 1.) Il est probable qu’un grand nombre des évêques africains entendaient le grec, et qu’un grand nombre des ouvrages théologiques des Grecs étaient traduits en latin.
  2. Comparez les deux Préfaces au Dialogue de Vigile de Thapse, p. 118, 119, édit. Chiflet : il aurait pu vouloir amuser un lecteur instruit par une innocente fiction ; mais le sujet était trop sérieux, et les Africains trop ignorans.
  3. Le père Quesnel annonça le premier cette opinion, qui fut favorablement reçue ; mais les trois vérités suivantes, toutes surprenantes qu’elles puissent paraître, sont universellement reconnues aujourd’hui. Gérard Vossius, t. VI, p. 516, 552 ; Tillemont, Mém. ecclés., t. VIII, p. 667-671 : 1o. Saint Athanase n’est point l’auteur du symbole qui se lit si souvent dans nos églises ; 2o. il ne paraît avoir existé que plus d’un siècle après la mort du saint prélat ; 3o. Il a été composé originairement en latin, et par con-