Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/62

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militaires des conquérans de Rome, sans prétendre discuter les motifs de leur conduite politique. Alaric sentait peut-être, au milieu de sa prospérité, quelque faiblesse cachée, quelque vice intérieur qui menaçait sa puissance, ou peut-être sa modération apparente ne tendait-elle qu’à désarmer les ministres d’Honorius en trompant leur complaisante crédulité, Alaric déclara plusieurs fois qu’il voulait être regardé comme l’ami de la paix, et des Romains. Trois sénateurs se rendirent à sa pressante requête, comme ambassadeurs à la cour de Ravenne, pour solliciter l’échange des otages et la ratification du traité ; et les conditions qu’il proposa clairement durant le cours des négociations, ne pouvaient faire soupçonner sa sincérité que par une modération qui semblait peu convenir à l’état de sa fortune. Alaric aspirait encore au rang de maître général des armées de l’Occident. Il stipulait un subside annuel en grains et en argent, et choisissait les provinces de Dalmatie, de Norique et de Vénétie pour l’arrondissement de son nouveau royaume, qui l’aurait rendu maître de la communication importante entre l’Italie et le Danube, Alaric paraissait disposé, en cas que ces demandes modestes fussent rejetées, à renoncer au subside pécuniaire, et à se contenter même de la possession de la Norique, province dévastée, appauvrie et continuellement exposée aux incursions des Germains[1] ; mais toute espérance de paix fut anéantie par l’obstination aveugle ou

  1. Zosime, l. V, p. 367, 368, 369.