Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/83

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chariots qui suivaient l’armée des Goths ; les plus parfaits chefs-d’œuvre de l’art étaient brisés par maladresse ou détruits par plaisir. On fondit des statues pour en retirer le métal ; et plus d’une fois dans le partage du butin, des vases furent mis en morceaux d’un coup de hache d’arme. L’acquisition de ces richesses ne servit qu’à enflammer l’avidité des Barbares, et ils employaient les menaces, les mauvais traitemens et les tortures pour forcer les citoyens à découvrir l’endroit qui recelait leurs trésors[1]. L’apparence du luxe et de la dépense leur faisait supposer une grande fortune, et ils attribuaient l’apparence de la pauvreté à l’avarice ou à l’économie. L’obstination avec laquelle quelques Romains avaient souffert les traitemens les plus cruels avant de trahir le dépôt de leurs richesses, devint funeste à des malheureux que les Barbares faisaient expirer sous les coups de fouet pour les forcer à déclarer des trésors imaginaires. Les Goths détruisirent ou mutilèrent quelques édifices de Rome ; mais le dommage a été fort exagéré. En entrant par la porte Salarienne, ils mirent le feu aux

  1. Marcella, Romaine également distinguée par son rang, par son âge et par sa piété, fut renversée à terre et inhumainement battue et fouettée : Cæsam fustibus flagellisque, etc. Saint Jérôme, tom. I, p. 121, ad Principiam. Voy. saint Augustin, De Civ. Dei, l. I, c. 10 Le moderne Sacco di Roma, p. 208, donne une idée des différentes tortures que l’on faisait souffrir aux prisonniers pour découvrir leurs trésors.