Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/97

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l’extrémité de l’Italie, qu’il tourna ses regards sur l’île fertile et paisible qui en est voisine. Le roi des Goths ne considérait cependant la possession de la Sicile que comme le premier pas vers l’importante expédition qu’il méditait déjà contre l’Afrique. Le détroit de Reggio à Messine[1] a douze milles de longueur, et dans sa moindre largeur, à peu près un mille et demi de traversée. Les monstres fabuleux de la mer, les rochers de Scylla et le gouffre de Charybde, ne pouvaient effrayer que les plus timides et les plus ignorans des mariniers. Cependant, après l’embarquement de la première division des Goths, il s’éleva une tempête qui dispersa et engloutit une partie des bâtimens de transport. Les dangers de ce nouvel élément triomphèrent du courage des Barbares ; et la mort prématurée d’Alaric, arrivée à la suite d’une courte maladie, déconcerta l’entreprise et termina ses conquêtes. Les Goths déployèrent toute leur férocité dans les honneurs funèbres qu’ils rendirent à un héros dont ils célébrèrent la valeur et les succès par leurs lugubres applaudissemens. À force de travaux, leurs nombreux captifs détournèrent le cours du Busentin, petite rivière qui baigne les murs de Consentia. Après avoir construit au milieu de son lit, mis à sec, le sépulcre de leur général, orné des

  1. On trouve une excellente description du détroit de Messine, de Charybde et de Scylla, dans Clavier, Italia antiq., l. IV, p. 1293 ; et Sicil. antiq., l. I, p. 60-76. Il a soigneusement étudié les anciens, et examiné avec exactitude l’état actuel du pays.