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la perpétuelle arrivée de nouvelles colonies germaines et par leur rapide accroissement. On fait monter à trois cent mille le nombre des Saxons qui se rendirent aux ordres d’Hengist[1]. L’émigration entière des Angles était constatée du temps de Bède par la solitude de leur pays natal[2] ; et l’expérience a démontré que les hommes se multiplient rapidement sur un sol désert et fertile, où ils jouissent de la liberté et d’une subsistance abondante. Les royaumes saxons présentaient l’aspect d’un pays nouvellement découvert et cultivé. Les villes étaient petites, les villages éloignés, la culture languissante et mal dirigée. Le prix de quatre moutons équivalait à celui d’une acre de la meilleure terre[3]. Le vaste espace couvert par les bois et les marais était abandonné à la nature ; et l’évêché moderne de Durham, le territoire entier depuis la Tyne jusqu’à la Tees, revenu à son état primitif, ne présentait plus qu’une vaste forêt[4]. D’après cela, en effet, on concevrait aisé-

  1. Histoire d’Angleterre par Carte, vol. I, p. 195. Il cite les historiens bretons ; mais je soupçonne que Geoffroy de Monmouth est sa seule autorité, l. VI, c. 15.
  2. Bède, Hist. ecclés., l. I, c. 15, p. 52. Le fait est probable et bien attesté ; cependant tel était le mélange confus des tribus germaines, que nous trouvons dans une période suivante, la loi des Angles et des Warins de la Germanie. Lindenbrog, codex, p. 479-486.
  3. Voyez la savante et utile histoire de la Grande-Bretagne par le docteur Henri, vol. II, p. 388.
  4. Quicquid, dit Jean de Tinemouth, inter Tinam et Tesam fluvios extitit sola eremi vastitudo tunc temporis fuit,