Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/431

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ni défis, ni le danger de ses plus fidèles sujets, ne purent déterminer le roi des Goths à sortir des fortifications de Ravenne. L’artifice ni la force ne pouvaient rien, à la vérité, contre ces fortifications ; et lorsque Bélisaire eut investi cette capitale, il ne tarda pas à se convaincre que la famine était le seul moyen qui lui restât de dompter l’opiniâtreté des Barbares. Il fit garder soigneusement la mer, le côté de terre et les canaux du  ; et sa moralité ne l’empêcha pas d’étendre les droits de la guerre jusqu’à celui d’empoisonner les eaux[1] et à mettre secrètement le feu aux magasins[2] d’une ville assiégée[3]. Tandis

  1. Durant le siége d’Auximum il s’efforça d’abord de détruire un vieil aquéduc, et il jeta ensuite dans les eaux 1o. des cadavres ; 2o. des herbes malfaisantes, et 3o. de la chaux vive, que les anciens nommaient τιτανος dit Procope (l. II, c. 29), et que les modernes appellent ασβεσ‌τος. Toutefois ces deux mots sont employés comme synonymes dans Galien, Dioscorides et Lucien. (H. Étienne, Thesaur. ling. græc., t. III, p. 748).
  2. Les Goths soupçonnèrent Mathasuintha d’avoir contribué à cet incendie, qui fut peut-être l’effet de la foudre.
  3. Dans la rigueur philosophique il paraît contradictoire de borner les droits de la guerre. Grotius lui-même se perd dans la vaine distinction, entre jus naturæ et jus gentium, entre le poison et l’infection. Il met d’un côté de la balance les passages d’Homère (Odyss., A. D. 259, etc.), et de Florus (l. II, c. 20, no 7, Ult.) ; de l’autre les exemples de Solon (Pausanias, l. X, c. 37), et de Bélisaire. Voyez son ouvrage (De Jure belli et pacis, l. III, c. 4, s. 15, 16, 17 et dans la version de Barbeyrac, t. II, p. 257, etc.). Au reste, je comprends les avantages et la validité d’une convention