Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/313

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recevoir ou dédaigner l’humble avis des assesseurs ; [Assesseurs.] et un seul magistrat, élevé ou chassé d’après le caprice de l’empereur, exerçait dans chaque tribunal la juridiction civile et criminelle.

Exil et mort volontaire.

Un Romain accusé d’un crime capital était le maître de prévenir son arrêt en s’exilant ou en se donnant la mort. On présumait son innocence, et on le laissait en liberté jusqu’à ce que son crime fût prouvé d’une manière légale : tant qu’on n’avait pas compté et déclaré les votes de la dernière centurie, il pouvait se retirer en paix dans quelqu’une des villes alliées de l’Italie, de la Grèce ou de l’Asie[1]. Cette mort civile conservait du moins à ses enfans l’honneur et la fortune, et les plaisirs de l’esprit ou des sens lui offraient encore tout le bonheur qu’un esprit accoutumé au fracas et à l’ambition de Rome était capable de goûter dans l’uniformité ou le silence de Rhodes ou d’Athènes. On avait besoin de plus d’intrépidité pour se soustraire à la tyrannie des Césars ; mais les maximes des stoïciens, l’exemple des plus braves d’entre les Romains, et les encouragemens que la loi donnait au suicide, rendaient cette intrépidité familière. On exposait après leur mort, d’une manière ignominieuse, les criminels condamnés par les juges ; et, ce qui était un mal plus réel, on confisquait leurs biens, et on réduisait ainsi leurs enfans à la misère. Lorsque les victimes de

  1. Polybe, l. VI, p. 643. L’étendue de l’empire et des lieux renfermés dans la cité de Rome obligeait l’exilé à chercher une retraite plus éloignée.