Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/393

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

par le fils ; la disgrâce et l’exil des amis de Chosroès favorisèrent leur tyrannie ; et la vertu s’éloigna par degrés du cœur d’Hormouz, de son palais et de son gouvernement. De fidèles agens, institués pour être les yeux et les oreilles du prince, voulurent l’informer des progrès du désordre ; ils lui représentèrent les gouverneurs des provinces fondant sur leur proie avec la rapacité des lions et des aigles ; ils lui montrèrent la rapine et l’injustice s’étudiant à faire abhorrer aux plus fidèles sujets le nom et l’autorité du souverain. La sincérité de cet avis fut punie de mort. Le despote méprisa les murmures des villes ; il étouffa les émeutes par des exécutions militaires ; il abolit les pouvoirs intermédiaires qui se trouvaient entre le trône et le peuple ; et cette même vanité puérile, qui ne lui permettait pas de se montrer autrement que la tiare sur la tête, le porta à déclarer qu’il voulait être le seul juge comme le seul maître de son royaume. Chacune des paroles et chacune des actions du fils de Nushirwan annonçait à quel point il avait dégénéré les vertus de son père. Son avarice fraudait les troupes de leur solde ; des caprices jaloux avilissaient les satrapes ; le sang de l’innocent souillait le palais, les tribunaux et les eaux du Tigre ; et le tyran s’enorgueillissait des souffrances des treize mille victimes qu’il avait fait expirer dans les tourmens. Il daignait quelquefois justifier sa cruauté en disant que la crainte des Persans enfantait la haine, et que leur haine devait les conduire à la révolte ; mais il oubliait que ces sentimens