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la forteresse de Pétra[1], qui dominait la côte maritime au sud du Phase. La Colchide fut livrée à la licence des mercenaires étrangers qui devaient la protéger par leur valeur ; un vil et tyrannique monopole anéantit le commerce ; et Gubazes, le prince du pays, ne fut plus qu’un fantôme de roi, soumis aux officiers de Justinien. Trompés dans les espérances qu’ils avaient fondées sur les vertus des chrétiens, les Laziques indignés eurent quelque confiance dans la justice d’un mécréant. Après avoir obtenu l’assurance secrète que leurs ambassadeurs ne seraient pas livrés aux Romains, ils sollicitèrent publiquement l’amitié et les secours de Chosroès. L’habile monarque apercevant tout de suite les avantages qu’il pouvait tirer de la Colchide, médita un plan de conquête, que reprit mille ans après Schah Abbas, le plus sage et le plus puissant de ses successeurs[2]. Son ambition était enflammée par l’espérance d’avoir une marine à l’embouchure du Phase, de dominer le commerce et la navigation de l’Euxin, de ravager

  1. Il ne reste aucun vestige de Pétra, si ce n’est dans les écrits de Procope et d’Agathias. On peut retrouver la plupart des villes et des châteaux de la Lazique en comparant leur nom et leur position avec la Carte de Mingrélie qu’a donnée Lamberti.
  2. Voyez les Lettres amusantes du voyageur Pietro della Valle, Viaggii, l. II, p. 207, 209, 213, 215, 266, 286, 300 ; t. III, p. 54, 127. En 1618, 1619 et 1620, il conversa avec Schah Abbas, et l’encouragea fortement à l’exécution d’un projet qui aurait uni la Perse et l’Europe contre les Turcs, leur ennemi commun.