Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 9.djvu/237

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çons, nous fait douter de la véracité de l’historien et du mérite du héros. On ne peut toutefois se refuser à la vérité de cette importante remarque : que les désordres de cette époque furent le malheur et la gloire d’Alexis ; et que les vices de ses prédécesseurs et la justice du ciel accumulèrent sur son règne toutes les calamités qui peuvent affliger un empire dans sa décadence. En Orient, les Turcs victorieux avaient établi, de la Perse à l’Hellespont, le règne du Koran et du croissant : la valeur chevaleresque des peuples de la Normandie envahissait l’Occident, et dans les intervalles de paix, le Danube apportait de nouveaux essaims de guerriers, qui avaient acquis dans l’art militaire ce qu’ils avaient perdu du côté de la férocité des mœurs. La mer n’était pas plus tranquille que le continent, et tandis qu’un ennemi déclaré attaquait les frontières, des traîtres et des conspirateurs alarmaient l’intérieur du palais. Tout à coup les Latins déployèrent l’étendard de la croix : l’Europe se précipita sur l’Asie, et cette inondation fut au moment d’engloutir Constantinople. Durant la tempête, Alexis gouverna le vaisseau de l’empire avec autant de dextérité que de courage. À la tête des armées, hardi, rusé, patient, infatigable, il savait profiter de ses avantages, et se relever d’une défaite avec une vigueur que rien ne pouvait abattre. Il rétablit la discipline parmi les troupes ; et son exemple, ainsi que ses préceptes, créèrent une nouvelle génération d’hommes et de soldats. Il montra dans ses négociations avec les Latins toute sa pa-