Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/100

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de la Mecque vit avec étonnement l’attention des fidèles aux paroles et aux regards du prophète, leur empressement à recueillir, soit ses crachats, soit la partie de ses cheveux qui tombait à terre, soit l’eau qui avait servi à ses ablutions, comme si tous ces objets avaient eu un degré de vertu prophétique. « J’ai vu, dit-il, le Chosroès de la Perse et le César de Rome ; mais je n’ai jamais vu un roi aussi respecté de ses sujets que Mahomet l’est de ses compagnons. » La dévote ferveur du fanatisme se manifeste en effet d’une manière plus énergique et plus vraie que la froide et cérémonieuse servilité des cours.

Il déclare la guerre aux infidèles.

Dans l’état de nature, chaque homme a le droit d’employer la force des armes à la défense de sa personne ou de ses propriétés, de repousser et même de prévenir la violence de ses ennemis, et de continuer ses hostilités jusqu’à ce qu’il ait obtenu une juste satisfaction ou qu’il soit arrivé au dernier point qu’autorisent les représailles. Dans la libre société des Arabes, les devoirs de sujet et de citoyen n’imposaient qu’un frein bien léger, et Mahomet, en exerçant une mission de charité et de paix, avait été dépouillé et banni par l’injustice de ses compatriotes. Le choix d’un peuple indépendant avait élevé le fugitif de la Mecque à la dignité d’un souverain, et il se trouvait revêtu avec justice de la prérogative de former des alliances et de faire la guerre offensive et défensive. La plénitude de la puissance divine suppléait à l’imperfection de ses droits et faisait la base de son pouvoir ; il prit dans ses nouvelles révéla-