Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/175

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pouvait subsister sans le lin d’Égypte ou sans les étoffes d’Arras. La vie de Gallien présente cependant de courts intervalles, où ce prince, irrité par quelque injure récente, déploya tout à coup l’intrépidité d’un soldat et la cruauté d’un tyran ; mais bientôt, rassasié de sang ou fatigué de la résistance, il reprenait insensiblement la mollesse naturelle et l’indolence de son caractère[1].

Les trente tyrans.

Tandis que les rênes de l’état flottaient en de si faibles mains, il n’est pas étonnant que toutes les provinces de l’empire aient vu s’élever contre le fils de Valérien une foule d’usurpateurs. Les écrivains de l’Histoire Auguste ont cru jeter plus d’intérêt dans leur récit en comparant les trente tyrans de Rome avec les trente tyrans d’Athènes : cette idée est probablement ce qui les a engagés à choisir ce nombre célèbre et connu[2]. Dans tous les points, le parallèle est imparfait et ridicule. Quelle ressemblance pouvons-nous apercevoir entre un conseil de trente personnes réunies pour opprimer une seule ville, et une liste incertaine de rivaux indépendans, dont l’élévation et la chute se succédaient sans aucun ordre

  1. Je crois que ce caractère singulier nous a été fidèlement transmis. Le règne de son successeur immédiat fut court et agité ; et les historiens, qui écrivirent avant l’élévation de la famille de Constantin, ne pouvaient avoir aucune espèce d’intérêt à représenter sous de fausses couleurs le caractère de Gallien.
  2. Pollion paraît singulièrement embarrassé pour compléter le nombre.