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le siége de sa résidence en hiver, et l’objet de son affection particulière. Cette superbe capitale, qui comprend aujourd’hui un terrain immense sur les deux rives de la Seine, n’occupait alors qu’une petite île au milieu de la rivière, qui fournissait une eau pure et salutaire à ses habitans. La Seine baignait le pied des murs, et on ne pouvait entrer dans la ville que par deux ponts de bois. Une épaisse forêt couvrait le nord de la rivière ; mais le sud, qui porte aujourd’hui le nom d’université, fut insensiblement bâti et orné d’un palais, d’un amphithéâtre, d’un aqueduc, de bains et d’un champ de Mars pour exercer les troupes. La rigueur du climat était tempérée par le voisinage de l’Océan ; et avec quelques précautions que l’expérience avaient enseignées, la vigne et les figuiers s’y cultivaient avec succès. Mais dans les hivers très-rigoureux, la Seine se glaçait profondément, et les énormes morceaux de glace qui flottaient sur ses eaux, auraient pu être comparés par un Asiatique aux blocs de marbre blanc que l’on tirait des carrières de la Phrygie. La licence et la corruption d’Antioche rappelèrent depuis au souvenir de Julien les mœurs simples et austères de sa chère Lutèce[1], où les plaisirs du théâtre étaient inconnus ou mépri-

    dans leurs Notices sur l’ancienne Gaule ; par l’abbé de Longuerue, Description de la France, t. I, p. 12, 13 ; et M. Bonamy, dans les Mémoires de l’Académie des inscript., t. XV, p. 656, 691.

  1. Την φιλην Λευκετιαν. Julien, in Misopogon., p. 340. Leucetia ou Lutetia était l’ancien nom de la cité qui, selon