Page:Gide - Œdipe, 1931.djvu/19

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dieux, c’est pour en devenir plus modeste et reporter à eux le mérite de ma destinée. Car, dans mon cas précisément, c’est assez difficile de n’être pas quelque peu gonflé par soi-même. J’y parviens en créant au-dessus de moi une sacrée puissance à laquelle, que je le veuille ou non, je sois soumis. Qui ne se soumettrait volontiers à une sacrée puissance, dès qu’elle conduit où je suis ? Un dieu te mène, Œdipe ; et il n’y en a pas deux comme toi. C’est ce que je me dis les dimanches, et jours de fête. Le reste de la semaine je ne trouve pas le temps d’y penser. D’ailleurs, à quoi bon ? Je raisonne mal ; la logique n’est pas mon fort ; je procède par intuition. Il y en a qui se demandent à tout bout de champ et dans tous les embarras de voitures :