Page:Gide - L’Immoraliste.djvu/214

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pite en cette affaire, ce n’est pas le triple commerce d’Alcide, c’est de le voir ainsi me tromper. Et puis que font-ils de l’argent, Bute et lui ? Je n’en sais rien ; je ne saurai jamais rien de tels êtres. Ils mentiront toujours, me tromperont pour me tromper. Ce soir ce n’est pas cent sous, c’est dix francs que je donne à Bute : je l’avertis que c’est pour la dernière fois et que si les collets sont repris, c’est tant pis.

Le lendemain, je vois venir Bocage ; il semble très gêné ; je le deviens aussitôt plus que lui. Que s’est-il donc passé ? Et Bocage m’apprend que Bute n’est rentré qu’au petit matin sur la ferme ; Bute est soûl comme un Polonais ; aux premiers mots que lui a dits Bocage, Bute l’a salement insulté, puis s’est jeté sur lui, l’a frappé…

– Enfin, me dit Bocage, je venais savoir si Monsieur m’autorise (il reste un instant sur le mot), m’autorise à le renvoyer.

– Je vais y réfléchir, Bocage. Je suis très désolé qu’il vous ait manqué de respect. Je