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la porte étroite

sis par toi, qui t’arrachent sans cesse à toi-même, te fatiguent, dépêchent tes journées, et le soir, te précipitent, plein de fatigue, dans le sommeil. L’émouvante description que tu m’as faite des manœuvres m’a hantée. Ces dernières nuits où je dormais mal, plusieurs fois je me suis réveillée en sursaut à l’appel de la Diane… positivement, je l’entendais. J’imagine si bien cette sorte d’ivresse légère dont tu parles, cette allégresse matinale, ce demi-vertige… Dans l’éblouissement glacé de l’aube, que ce plateau de Malzéville devait être beau !…

Je vais un peu moins bien depuis quelque temps ; oh ! rien de grave. Je crois que je t’attends un peu trop fort, simplement. »

Et six semaines plus tard :

« Voici ma dernière lettre, mon ami. Si peu fixé que tu sois encore sur la date de ton retour, elle ne peut beaucoup tarder ; je ne pourrais plus rien t’écrire. C’est à Fongueusemare que j’aurais désiré te revoir, mais la saison est devenue mau-