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la porte étroite

crains tout à la fois… Je ne l’ai jamais plus aimé.


Et s’il vous faut, Seigneur, pour le sauver de moi, que je me perde, faites !…

« Entrez dans mon cœur et dans mon âme pour y porter mes souffrances et pour continuer d’endurer en moi ce qui vous reste à souffrir de votre Passion. »


Nous avons parlé de Pascal… Qu’ai-je pu lui dire ? Quels honteux, absurdes propos ! si je souffrais en les disant déjà, ce soir je m’en repens comme d’un blasphème. J’ai repris le livre pesant des Pensées, qui de lui-même s’est ouvert à ce passage des lettres à Mlle de Roannez :

« On ne sent pas son lien quand on suit volontairement celui qui entraîne ; mais quand on commence à résister et à marcher en s’éloignant on souffre bien. »

Ces paroles me touchaient si directement que je n’ai pas eu la force de continuer ma lecture ; mais rouvrant le livre à un autre endroit, ce fut pour