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la porte étroite

Jérôme ! Jérôme, mon ami douloureux près de qui mon cœur se déchire, et loin de qui je meurs, de tout ce que je te disais tantôt, n’écoute rien que ce qui te racontait mon amour.


Déchiré ma lettre ; puis récrit… Voici l’aube ; grise, mouillée de pleurs, aussi triste que ma pensée… J’entends les premiers bruits de la ferme et tout ce qui dormait reprend vie… « À présent levez-vous. Voici l’heure… »

Ma lettre ne partira pas.

5 octobre.

Dieu jaloux, qui m’avez dépossédée, emparez-vous donc de mon cœur. Toute chaleur désormais l’abandonne et rien ne l’intéressera plus. Aidez-moi donc à triompher de ce triste restant de moi-même. Cette maison, ce jardin encouragent intolérablement mon amour. Je veux fuir en un lieu où je ne verrai plus que Vous.


Vous m’aiderez à disposer pour vos pauvres de ce que je possédais de fortune ; laissez-moi disposer