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Page:Gide - Le Voyage d’Urien, Paludes.djvu/97

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Ah ! certes, m’écriai-je, nous voici très malheureux. Notre voyage est vraiment bien mal composé. Que signifie cette plaine si morne à ce moment de cette histoire ? ou que signifions-nous dans la plaine ? Si le soupçon nous vient ici de quelque chose d’inutile, nos âmes aussitôt désolées vont laisser leur vertu se répandre. Seigneur ! pour quelque chose d’inutile, nous n’aurons plus de foi ni de courage : — maintenant nous allons défaillir, — ou faudra-t-il tomber dans la piété dévotieuse ? Nous avons vécu par orgueil, et nos noblesses s’exaspéraient à l’âpreté de nos victoires. Notre vertu, Seigneur, est toute faite de résistance : mais autour de nous maintenant tout cède, tout se désagrège — et nous ne sentons plus nos courages. Voici que le tranquille passé en nous comme un regret remonte. — Nuit majestueuse et profonde où notre extase s’est éperdue ; textes de vérité, souvent où frissonnait une flamme métaphysique ; algèbres et théodicées, études ! nous vous avions quittées pour autre chose, ah ! pour autre chose vraiment. — On se met en route un matin, parce qu’on a trouvé dans l’étude qu’il