Page:Gide - Les Faux-monnayeurs.djvu/302

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« — Pas absolument, mais…

« — Qu’est-ce qui vous porte à le croire ?

« — D’abord, le fait que c’est un enfant naturel. Vous pensez bien qu’un garçon de son âge ne fiche pas le camp de chez lui sans avoir toute honte bue… Et puis je crois bien que Profitendieu a été pris de quelques soupçons, car son zèle s’est brusquement ralenti ; que dis-je, il a paru faire machine arrière, et la dernière fois que je lui ai demandé où cette affaire en était, il s’est montré gêné : « Je crois que, finalement, cela ne va rien donner », m’a-t-il dit, et il a vite détourné la conversation. Pauvre Profitendieu ! Eh bien ! vous savez, il ne mérite pas ce qui lui arrive. C’est un honnête homme, et, ce qui est peut-être plus rare : un brave garçon. Ah ! par exemple, sa fille vient de faire un bien beau mariage. Je n’ai pas pu y assister parce que j’étais en Hollande, mais Pauline et Georges étaient revenus pour cela. Je vous l’ai déjà dit ? Il est temps que j’aille dormir… Quoi, vraiment ! vous voulez tout payer ? Laissez donc ! Entre garçons, en camarades, on partage… Pas moyen ? Allons, adieu. N’oubliez pas que Pauline rentre dans deux jours. Venez nous voir. Et puis ne m’appelez donc plus Molinier ; dites donc : Oscar, simplement !… Je voulais vous demander cela depuis longtemps.

« Ce soir un billet de Rachel, la sœur de Laura :

« J’ai de graves choses à vous dire. Pouvez-vous,