Page:Gide - Les Nourritures terrestres.djvu/161

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J’ai vu dans le Nord des villages endormis au clair de lune ; les murs des maisons étaient merveilleusement bleus et jaunes ; autour d’eux s’étendait la plaine ; dans les champs traînaient d’énormes meules de foin. On sort dans la campagne déserte ; on rentre dans le village endormi…

Il y a des villes et des villes ; parfois on ne sait pas ce qui a pu les bâtir là. — Ô ! villes d’Orient, du midi ; villes aux toits plats, blanches terrasses, où, la nuit, les folles femmes viennent rêver. Plaisirs ; fêtes d’amour ; lampadères des places, qui font, quand on les voit des collines voisines, comme une phosphorescence dans la nuit.

Villes d’Orient ! fête embrasée ; rues qu’on appelle là-bas des rues saintes, où les cafés sont pleins de courtisanes et où des musiques trop aiguës les font danser. Les Arabes vêtus de blanc y circulent, et des enfants — qui me semblaient beaucoup trop jeunes, dis ? pour connaître déjà l’amour. (Il y en eut dont les lèvres étaient plus chaudes — que les petits oiseaux couvés).

Villes du Nord ! débarcadères ; usines ; villes dont la fumée cache le ciel. Monuments ; tours mobiles ;