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Page:Gide - Les Nourritures terrestres.djvu/21

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Tout ce que tu gardes en toi de connaissances distinctes, restera distinct de toi jusques à la consommation des siècles. Pourquoi y attaches-tu tant de prix ?

Il y a profit aux désirs, et profit au rassasiement des désirs — parce qu’ils en sont augmentés. Car, je te le dis en vérité, Nathanaël, chaque désir m’a plus enrichi que la possession toujours fausse de l’objet même de mon désir.

Non point la sympathie, Nathanaël, — l’amour.

Pour bien des choses délicieuses, Nathanaël, je me suis usé d’amour. Leur splendeur venait de ceci que j’ardais sans cesse pour elles. Je ne pouvais pas me lasser. Toute ferveur m’était une usure d’amour, — une usure délicieuse.

Hérétique entre les hérétiques, toujours m’attirèrent les opinions écartées, les extrêmes écarts des pensées, les divergences. Chaque esprit ne m’intéressait que par ce qui le faisait différer des autres. — J’en arrivai à bannir de moi la sym-