Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/117

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que le travail doit être une puissance infiniment variée dans ses procédés et dont la complexité défie toute analyse. Il n’en est rien. Il n’y a rien de plus dans le travail qu’une force musculaire dirigée par une intelligence ; il ne saurait donc produire d’autres effets que ceux d’une force motrice quelconque, et encore d’une force motrice très faible, à savoir un mouvement, un déplacement.

Ce déplacement peut consister soit dans un changement de lieu de l’objet lui-même, soit dans un changement de place de ses parties constitutives. Dans ce dernier cas, nous disons bien que l’objet a subi une transformation, mais toute transformation se réduit en somme à un déplacement. Les formes exquises que revêt l’argile sous ta main du potier ou du statuaire, les dessins riches et compliqués que suit la dentelle sous les doigts de la dentellière, ne sont que les effets produits par les déplacements des molécules de l’argile ou des fils du tissu. Tout ce que peut faire le travail de l’homme, c’est remuer, séparer, réunir, intervertir, superposer, arranger, rien que des mouvements. Prenez par exemple la production du pain passez en revue les divers actes de cette production, labourer, semer, moissonner, vanner, moudre, bluter, pétrir, enfourner, et vous verrez que tous ne représentent que certains déplacements imprimés à la matière. L’homme ne saurait avoir d’autre rôle dans l’œuvre de la production. Là se borne son pouvoir. Toutes les transformations intimes qui s’opèrent dans la constitution des corps, qui modifient leurs propriétés physiques ou chimiques et concourent par là à la production, l’évolution mystérieuse qui avec un germe fait une plante, la fermentation qui avec un jus sucré fait de l’alcool, la combinaison chimique qui avec du fer et du charbon fait de l’acier, ne sont pas son fait l’homme s’est borné à disposer les matériaux dans l’ordre voulu, le blé dans la terre, la vendange dans la cuve, le minerai dans le haut-fourneau ― c’est la nature qui a fait le reste.

En voyant combien faible est cette force motrice[1] et com-

  1. Cette force de l’homme est relativement faible, si on la compare à