Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/225

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tion des denrées qui devient un véritable péril pour la santé publique et qui est également un effet de la concurrence acharnée des marchands, on se trouve amené à se demander si les services rendus par ces intermédiaires ne sont pas payés aujourd’hui trop cher et si l’on ne pourrait pas trouver quelque autre mode d’organisation de l’échange moins onéreux pour la société ?

Le véritable remède serait évidemment de mettre directement en relations le producteur et le consommateur en supprimant les intermédiaires, ou du moins en réduisant leur nombre au minimun[1].

La grosse difficulté, c’est que le producteur ne peut guère vendre au détail, tandis que le consommateur peut encore moins acheter en gros. Mais cette difficulté ne paraît plus aujourd’hui insurmontable grâce à l’association sous une double forme : — soit l’association des producteurs qui s’entendent pour vendre directement au public, par exemple les syndicats agricoles (Voy. p. 194, note) ; soit l’association des consommateurs qui s’entendent pour acheter directement aux producteurs : c’est le rôle des sociétés coopératives de consommation (Voir au liv. IV).

Il n’est donc pas impossible de prévoir le jour où il n’y aurait plus de marchands. À première vue, un semblable progrès paraît constituer un retour en arrière puisqu’il nous ramènerait au système primitif dans lequel producteur et consommateur échangeaient directement leurs produits. Mais il ne faut

  1. Dès longtemps, et avant même sans doute que la classe des marchands se fût constituée, producteurs et consommateurs avaient trouvé le moyen de s’aboucher directement dans les marchés et tes foires qui ont joué un si grand rôle autrefois et qui ont encore conservé une certaine importance au milieu des populations rurales. Mais on ne peut songer à revenir à un semblable mécanisme qui serait encore plus onéreux que l’emploi des marchands, à raison de la perte de temps et des frais de transport qu’il exige : aussi tend-il à être de plus en plus abandonné. La fameuse foire de Beaucaire n’est plus guère qu’un grand marché régional ; toutefois dans les pays où les perfectionnements de l’échange ne sont pas encore introduits, les foires tiennent une place considérable : à l’extrémité orientale de l’Europe, la foire de Nijni-Novogorod fait encore 400 millions d’affaires et réunit 2 à 300.000 personnes venues des extrémités de l’ancien continent.