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la forme de titres négociables ou au porteur. Ces titres font l’objet d’un prodigieux commerce dont on ne pouvait se faire autrefois aucune idée[1], et les marchands qui ont la spécialité de ce commerce-là s’appellent les Banques.

Mais quelle utilité si grande peut-il y avoir, demandera-t-on peut-être, à représenter le crédit par des titres négociables ?

La voici : s’il est très avantageux pour l’emprunteur dans le prêt, ou pour l’acheteur dans la vente à terme, d’avoir un capital à sa disposition pendant un certain temps, à l’inverse il est très désavantageux pour le prêteur d’être réduit à s’en passer pendant le même laps de temps. Un fabricant a besoin tous les jours de faire des achats et de payer des salaires. Il ne peut marcher qu’à la condition de renouveler au jour le jour le capital qui lui est nécessaire par la vente de ses marchandises : mais s’il vend ses marchandises, à terme, c’est-à-dire sans être payé, il semble qu’il va lui devenir impossible de continuer ses opérations.

Comment faire ? On ne peut pourtant faire que le même capital soit en même temps à la disposition de deux personnes différentes, celle qui l’a prêté et celle qui l’a emprunté ?

Si, vraiment, on y parvient et c’est précisément le titre négociable qui réalise ce problème en apparence insoluble. En échange du capital par lui cédé, le prêteur ou le vendeur à terme reçoit un titre, c’est-à-dire un morceau de papier sous-diverses formes, billet à ordre, lettre de change, etc., et ce titre représente une valeur qui, comme toutes les valeurs, peut être vendue. Si donc le prêteur veut rentrer dans ses capitaux, rien de plus simple : il lui suffit de vendre, ou, comme on dit, de négocier son titre.

  1. La quantité de titres négociables ou, comme on dit, d’effets de commerce en circulation en France est de plus de 6 milliards en moyenne, de plus de 10 milliards en Angleterre. Mais à cela il faudrait ajouter les billets de banque, les chèques et les valeurs mobilières sous forme de titres au porteur, qui sont aussi, des titres de crédit, et on arriverait à un chiffre effrayant.