Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/608

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ces titres en argent et que fera-t-elle de cet argent ? Le serrera-t-elle dans son coffre-fort ? Assurément non, car si elle avait eu cette intention, elle se serait bien gardée de l’emprunter : elle va s’en servir, celle-ci pour creuser des puits, construire des machines, celle-là pour acheter du charbon, des rails, des traverses, l’une et l’autre surtout pour payer leurs employés ou leurs ouvriers et en embaucher de nouveaux. Il en est de même de tout autre cas de placement que l’on voudra imaginer.

Cependant le préjugé hostile au thésauriseur existe même contre celui qui place son argent. On s’imagine que l’homme qui serre des titres de rente ou des valeurs mobilières quelconques dans son portefeuille, thésaurise aussi, qu’il retire de l’argent de la circulation, et on ne voit pas que son argent est bien loin et qu’il court le monde, faisant aller le commerce et faisant travailler des ouvriers sur d’autres terres et sous d’autres cieux — peut-être des Chinois sur le chemin de fer Transsibérien, ou des Cafres dans les mines du Transvaal.

Il est vrai que c’est précisément là ce qui peut justifier dans une certaine mesure le préjugé populaire, car ce capital qui va faire vivre les ouvriers exotiques ne fera pas vivre les ouvriers du voisinage. Le placement, c’est le plus souvent une forme d’absentéisme des capitaux.



    que le capitaliste qui a vendu son titre sera bien forcé de chercher un emploi à l’argent qu’il a reçu en échange, et il est même probable que s’il a vendu son titre, c’est précisément parce qu’il avait en vue quelque autre emploi plus avantageux.