Page:Gilkin - La Nuit, 1897.djvu/256

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Contempteur, Destructeur, Novateur, triple Roi,
Toi, notre unique loi, toi, notre unique foi,
Satan, nous élevons nos cœurs brûlants vers toi !

Ton esprit inventif ne se peut satisfaire
De la banalité des cieux et de la terre
Et ton ricanement accuse Dieu le Père.

Mais tu sais allumer comme un divin flambeau
Dans les cerveaux humains le désir du nouveau,
Le mépris du réel et le culte du beau.

Sous ton aile de feu, qui frissonne sans trêve,
Le saint temple de l’art vers l’idéal s’élève ;
Et tu refais le monde et Dieu selon ton rêve.

Tu nous apprends les sons, les formes, les couleurs,
Le charme languissant des parfums séducteurs
Et le goût dépravant des perverses saveurs.

Le cri de ton orgueil fut la première rime
Et ton souffle a mêlé, pour embaumer l’abîme,
Les extases de l’art aux voluptés du crime.

Tu jettes des héros à la face des cieux
En faisant miroiter aux feux noirs de tes yeux
L’éloquence, l’histoire et les mythes des dieux.