Page:Gilkin - La Nuit, 1897.djvu/28

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Seul, un rouge soleil, un soleil assassin,
Lave ses rais sanglants, où le meurtre encore fume,
Dans les flots cramoisis d’un océan de vin.

Soudain de chaque vague émerge un front humain :
Faces d’hommes, d’enfants, où la colère allume
Les yeux ensanglantés de pourpre et de carmin,

Faces aux traits crispés de misère et de faim,
Ou que le vice enfla d’un hideux apostume
Dans les flots cramoisis d’un océan de vin.

Du sommeil limoneux de son tombeau marin
Le peuple des noyés séculaires s’exhume,
Les yeux ensanglantés de pourpre et de carmin.

Seigneur, avec ces morts, vais-je nager sans fin
En la stupide horreur d’une ivresse posthume,
Les yeux ensanglantés de pourpre et de carmin,
Dans les flots cramoisis d’un océan de vin ?