Page:Gillet - Histoire artistique des ordres mendiants.djvu/63

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cheurs prirent le parti de les abroger tout à fait. J’ignore si les Mineurs eurent le même courage, mais pratiquement leurs ordonnances tombèrent en désuétude. Avec plus de tiraillements, d’hésitation de côté et d’autre, eux aussi, ils finirent par « s’adapter ».

C’est dommage, dira-t-on peut-être. On regrettera que les Mendiants n’en soient pas demeurés à leur premier état d’entière liberté et de sainte bohême, la bride sur le cou, imprévoyants, charmants, — qu’ils aient subi, en quelque sorte, la domestication sociale. Sans doute, de tous les édifices dont nous allons parler, aucun ne dut être plus agréable à Dieu que cette première chapelle d’Oxford, si humble que le charpentier ne fut qu’un jour à la bâtir : quoi de plus touchant que ces hommes qui s’en vont conquérir le monde avec des jouets d’enfants ? Mais si les Spirituels et les intransigeants eussent triomphé, par impossible, quelle perte, non seulement pour l’art, mais aussi pour le bien ! Quel capital moral, quel trésor de spiritualité représenté par ces églises qu’ils maudissaient ! Quelle foule, à travers les âges, a entendu là les mots divins !

Mieux encore : l’âme des fondateurs n’est pas absente de ces murs qu’ils n’ont pas construits ; leurs églises sont faites, malgré tout, à leur ressemblance. La matière n’a pu opprimer leur esprit : c’est elle qui, au contraire, en a reçu sa forme. Quelque chose d’indestructible, un charme sui generis y flotte ou y subsiste, où se respire encore le génie des deux chefs des tribus mendiantes.


II


La basilique d’Assise fut élevée presque tout entière sous le généralat d’Élie. La dédicace n’eut lieu qu’en