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un parfum évangélique. Aimables églises mendiantes, point savantes, point compliquées, n’ayant rien qui intrigue l’esprit et s’adresse à l’intelligence, — êtes-vous de l’architecture, êtes-vous même de l’art ? Je l’ignore. Mais à coup sûr vous êtes de la poésie.


IV


Ces caractères persistent même en pays gothique, en France ou en Allemagne. Partout, vous retrouvez la même simplicité, cet accueil, cette bienveillance que j’essayais de vous décrire. À travers toute l’histoire, ces roturières sont restées les églises des foules. En 1789, c’est là que se tiennent spontanément les assemblées du peuple, les États-Généraux de la démocratie. Les Prêcheurs de la rue Saint-Jacques avaient reçu, dès le XIIIe siècle, le sobriquet de Jacobins ; les Cordeliers ou Franciscains logeaient là tout auprès (leur réfectoire est aujourd’hui le musée Dupuytren). Cordeliers, Jacobins, les noms en témoignent encore : ces deux églises plébéiennes devinrent naturellement les deux laboratoires de la Révolution[1].

De tout ce que les frères avaient bâti, il reste par malheur peu de chose. En Espagne même, de rares maisons remontent plus haut que le XVe siècle, et elles relèvent de notre gothique du Midi : Saint-François de Lugo, Saint-Thomas d’Avila, ou le beau couvent portugais de Batalha peuvent servir d’exemples[2]. Dans le reste de l’Europe, le « progrès » ne nous a pas ménagé les

  1. Le fameux club se tenait aux Jacobins de la rue Saint-Honoré.
  2. Lamperez y Romea, Historia de la arquitectura cristiana española, Madrid, 1909, t. II, p. 516 et suiv. San Juan de Los Reyes, le célèbre couvent franciscain de Tolède, le type du style « mudejar », et de l’architecture la plus décorative et la plus blasonnée qui soit, date de 1476.