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Page:Ginguené - Lettres sur les Confessions de J. J. Rousseau, 1791.djvu/23

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ques autres perſonnages, & de les avoir mis au grand jour, ſoit qu’ils aient été les tyrans de ſon enfance, ou les oppreſſeurs de ſa jeuneſſe, ou ſes obſcurs perſécuteurs dans un âge plus avancé. Toutes ces peintures ſecondaires contribuent au mouvement, à la variété, à la vérité de ſes tableaux : elles ne nous amuſent qu’aux dépens d’originaux qui n’exiſtent plus, & qui la plupart inconnus, même de leur vivant, ne ſont là, pour ainſi dire, que comme des portraits de fantaiſie.

On lui a ſur-tout pardonné d’avoir ſi bien peint l’ineptie, l’avidité meſquine & les ſots caprices de ce Montaigu, ambaſſadeur à Veniſe, de la façon du valet-de-chambre Barjac[1], qui faiſoit & défaiſoit alors les ambaſſadeurs & les miniſtres. Il a toujours été permis, il l’eſt aujourd’hui plus que jamais, à l’homme de génie, d’écraſer d’un coup de plume l’inſecte orgueilleux qui ſe prevalut de quelques titres, ſouvent acquis par la baſſeſſe, pour ſe diſpenſer avec lui d’égards & de juſtice. Ce n’eſt pas-là proprement un ennemi ; c’eſt un fâcheux, un être importun & ridicule, dont on

  1. Valet-de-chambre du cardinal de Fleury. Voyez les Mémoires du Maréchal de Richelieu.