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ÉTUDES SUR LA POÉSIE GRECQUE

pas mercenaire », loue la générosité des vainqueurs opulents pour lesquels « il cueille des fleurs dans le jardin des Grâces » ; mais quelle différence de ton et de situation, et comme la poésie est descendue depuis deux siècles !

C’est qu’aussi elle a beaucoup produit et que la force lui manque en même temps que la hauteur de l’inspiration. En lisant Callimaque et Apollonius, on s’aperçoit bien que depuis longtemps l’âge de la grande épopée, celui du drame et du lyrisme, sont passés. Un pareil épuisement n’a rien qui doive surprendre ; on peut s’étonner, au contraire, qu’il soit si tardif et qu’il laisse encore assez de sève pour tant d’œuvres intéressantes qui remplissent la période alexandrine, et d’abord pour les idylles de Théocrite. Reconnaissons comme le premier mérite de cet aimable poète, comme celui qui le tire absolument de pair dans cette période de féconde médiocrité, d’avoir eu le sens de lui-même et de son temps, d’avoir proportionné son ambition aux ressources de l’âge auquel il appartenait, comme à celles de son heureuse nature. Sans cela ses qualités originales auraient avorté.

Ce soin volontaire de se limiter est nettement marqué chez lui. Non seulement il restreint le champ de la poésie et la réduit à un ton plus modeste, mais il s’enferme dans des formes très dé-