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LA PASTORALE DANS THÉOCRITE

aller un peu plus loin : il faut marquer davantage et nettement distinguer, pour bien déterminer le caractère de cette poésie, d’un côté le goût de la réalité avec sa saveur ou même avec sa crudité ; de l’autre, un goût de recherche élégante et ingénieuse, admettant une part de convention ou d’idéal dont la proportion varie selon le sujet.

Les poèmes conservés de Théocrite, si l’on néglige quelques pièces érotiques et les épigrammes, qui n’offrent rien de particulier à notre attention, se répartissent à peu près entre trois genres : il a fait des pièces épiques, ce que les Grecs appelaient des mimes, et des chants bucoliques. Les pièces épiques justifient ce nom par le sujet plus que par la manière dont elles sont traitées. À la fin de l’une d’elles, les Dioscures, le poète indique lui-même à mots couverts quelle est la mesure de ses prétentions. De même qu’Homère, par ses chants, a donné la gloire à Hélène et aux destructeurs de Troie, de même, lui aussi, il apporte, dit-il, comme offrandes aux deux héros « les douceurs des muses harmonieuses, ce qu’elles veulent bien donner elles-mêmes et ce que peut fournir sa maison ». Les ressources de sa maison, il le sait, sont bornées ; et l’épopée ou même l’hymne épique se réduisent chez lui aux proportions des narrations familières, des récits de veillée, où la grandeur et la passion sont remplacées par le goût de