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ÉTUDES SUR LA POÉSIE GRECQUE

gination se plaisait aux récits d’amours extraordinaires, que recueillait la curiosité de l’érudition mythologique. On s’intéressait aux peintures de la passion ; on en aimait surtout les raffinements et les mignardises. M. Couat remarque spirituellement qu’il y a en chacun de nous un secret penchant pour les sentiments faux. Chez les alexandrins, ce penchant se montra fort à découvert. Leur galanterie fit fleurir la poésie anacréontique avec ses finesses et ses grâces précieuses. C’est chez eux que s’est formée cette langue que le roman sentimental et même la haute poésie devaient parler si longtemps jusque chez les modernes. La troupe des petits Amours avec leurs flèches, les blessures qu’ils font, les feux qu’ils allument ; les roses et les astres sur les joues et dans les yeux des femmes aimées ; les serments, les confidences et les apostrophes à la nature sauvage : tout ce répertoire d’expressions, d’images et de lieux communs est un legs d’Alexandrie. C’est ce que fait bien voir un des chapitres les plus intéressants de M. Couat, que remplit la restitution d’une élégie de Callimaque sur les amours de Cydippe et d’Acontius.

Ces influences ont agi sur Apollonius, et peut-être, malgré lui, ont-elles été prédominantes, puisque cette grande épopée héroïque qu’il avait osé entreprendre, fut pour une bonne part une épopée