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VI

LA VEILLE DE LA TEMPÊTE


Où allait-il ? Il ne le savait pas. Lorsqu’il avait pris son chapeau pour sortir, son cerveau était en ébullition, son sang lui brûlait les veines. Il n’était plus son maître.

Deux sentiments opposés remplissaient son cœur : l’amour, la haine.

Oui, l’amour possédait son âme. Il aimait de toutes les puissances de son être. Il aimait comme l’aigle aime l’aiglon, comme les tourterelles se chérissent, comme le lierre embrasse le tronc auquel il s’attache.

Lui qui avait toujours été d’un scepticisme absolu envers ce noble sentiment de la nature, maintenant, il voulait y croire, parce qu’il aimait.

Hubert pensait parfois, en culottant paisiblement sa pipe de terre blanche au coin de l’âtre : L’amour, l’amour existe-il en ce monde dans lequel nous pataugeons, ou a-t-il jamais existé ? À part l’amour maternel porté jusqu’à l’héroïsme, tout n’est-il pas que honteuse bouffonnerie ? La femme, qu’est-elle, après tout, quand l’amour vient lui souffler à l’oreille des paroles enchanteresses ? Une abeille qui butine de fleur en fleur, qui se grise du plus délicieux de leur suc et qui, affreusement ivre, s’en va à la recherche d’un miel plus succulent et plus neuf ! N’est-ce pas le papillon aux ailes polychromes, qui, faisant rutiler aux éblouissants rayons du soleil ses ailes duvetées, se repose tantôt sur un lys, tantôt sur une branche de muguet, tantôt