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FLORENCE

que l’Anglais qui cherche à nous faire ramper à ses pieds. » Ne suis-je donc plus ce Canadien-français qui a déjà verse son sang pour la cause de la patrie souffrante ?

Soudain, il entend résonner des pas de cheval qui s’arrêtent à la porte. Alors son patriotisme, un instant assoupi, se réveille. Il repousse la jeune fille et, s’élançant vers la porte, il s’écrie dans un suprême élan du cœur :

— Adieu, Florence, adieu !

Et le front encore entouré de bandages ensanglantés, la chevelure en désordre, l’œil agrandi par la fièvre, il a une main sur la poignée de la porte, prêt à fuir cette maison désormais maudite, lorsqu’il voit en face de lui Mtre Jean Drusac, Gustave Turcobal, et un féal sujet de sa Très Gracieuse Majesté Georges III, qui veulent l’arrêter au passage.

— Au revoir, monsieur, ricana le jeune patriote ; on ne me prend pas comme une souris dans une souricière. Continuez votre œuvre de dégradation. Rampez, rampez, rampez toujours, essuyez la poussière du soulier de l’Anglais, et lorsque vous vous serez suffisamment avilis et avachis, peut-être obtiendrez-vous une petite médaille ou un bout de ruban pour vous récompenser de votre loyalisme. Nous nous reverrons, je l’espère. Je vous donne rendez-vous à Saint-Denis.

En sortant, il voit Baptiste qui l’attendait à la porte avec le cheval qu’il tenait par la bride.

— Baptiste, dit-il, en serrant affectueusement les mains de son généreux compagnon, je te confie ce que j’ai de plus cher au monde.