Page:Girardin - La Canne de M. de Balzac.djvu/189

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tr’ouverte dont la signature le fit tressaillir :

Chateaubriand !

Cette lettre, par laquelle M. de Chateaubriand s’excusait de ne pouvoir venir à cette soirée, avait été certainement oubliée là exprès, et laissée sur la table avec intention. La maîtresse de la maison comptait évidemment sur les indiscrets.

Tancrède réalisa ses vues et lut avec curiosité la lettre suivante :


« Je n’ai jamais été si tenté de ma vie. Conjurer d’une manière si aimable une vieille bête comme moi ! j’ai besoin de mes quarante ans de vertu pour résister à cette double attaque de votre beauté et de votre esprit ; encore Dieu sait comme je m’en tire ! Hélas ! je ne sors point, je ne sors plus, je ne vis plus. Si je dure jusqu’à l’hiver prochain, je compte déposer mes trois cheveux gris sur l’autel des Parques, afin qu’elles ne se donnent pas la peine de les couper, et je prendrai mon rang parmi les plus anciennes perruques de votre connaissance. Que votre jeunesse ait pitié de mes catarrhes,