Page:Gistucci - Le Pessimisme de Maupassant, 1909.djvu/17

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portât lui-même ses investigations sur la maladie et l’hérédité de Guy de Maupassant. Le docteur Alexandre Lacassagne est un lettré et un Maupassantiste fervent. Le public gagnerait sans doute à connaître les résultats d’une enquête où il mettrait la marque de sa probe et haute science.

Pour nous, nous nous en tiendrons à l’enquête purement morale et littéraire. Le plus scrupuleux des biographes de notre auteur, le dernier en date et le mieux informé,[1] n’a touché cette matière qu’avec circonspection. Nous tâcherons d’imiter sa réserve — et sa prudence.


Une chose pourtant demeure certaine. C’est que Maupassant connut, tout jeune encore, l’espèce particulière d’ennui qui caractérise le pessimiste[2].

Fût-ce hérédité « maternelle », comme l’affirme son ami d’enfance, Charles Lapierre ; fût-ce maladie spécifique, aggravée de surmenage physique et de « débauche » de travail intellectuel, le tout aidant à former en lui un « candidat à la paralysie générale », ce qui est l’opinion du docteur Glatz, de Max Nordau et de bien d’autres ; fût-ce enfin, comme l’ont prétendu tout récemment les docteurs Rémond et Voivenel, « délire systématisé progressif » ; — le fait est là, Maupassant a été, de bonne heure, atteint de névrose.

Son génie s’est accompagné d’exaltations et de dépressions intermittentes, d’hyperesthésie et, pour dire le mot, de folie.


Mais, si cette « folie » n’a jamais un instant fait pâlir son « génie », si son esprit est demeuré clair, malgré les assauts

    set (Dr Odinot), 1906 ; Montaigne malade et médecin (Dr Delacroix), 1907 ; Thomas de Quincey (Dr Guerrier) ; Hoffmann (Dr Demerliac), 1908, etc.

  1. Ed. Maynial, livre cité.
  2. Cf. la lettre de G. Flaubert du 15 juillet 1878, tome IV de sa Correspondance.