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de l’excellence ou de l’autorité.

prend le nom de prophètes dans le sens général d’auteurs inspirés ; il en avertit lui-même.

Saint Grégoire le Grand, qui vivait au VIIe siècle, après avoir rapporté les différents sentiments par rapport à l’auteur du livre de Job, décide ainsi la question : « Il est inutile de rechercher qui a composé ce livre, puisque les fidèles ne doutent pas que le Saint-Esprit n’en soit l’auteur. C’est donc véritablement l’Esprit de Dieu qui l’a écrit, puisqu’il en a inspiré les pensées à l’auteur qui l’a composé, et qu’il s’est servi de ses paroles pour faire passer jusqu’à nous des actions de vertu que nous puissions imiter. Nous passerions sans doute pour ridicules, si, lisant des lettres que nous aurions reçues de quelque grand personnage, nous négligions à la fois, et la personne de l’auteur et le sens de ses paroles, pour nous amuser à rechercher inutilement avec quelle sorte de plume il les aurait écrites. Ainsi, lorsque après avoir su que le Saint-Esprit est l’auteur de cet ouvrage, si nous nous arrêtons à examiner trop curieusement qui est celui qui l’a écrit, que faisons-nous autre chose sinon de disputer de la plume, lorsque nous pouvons profiter utilement des lettres que nous lisons[1] ? » Nous parcourrions le cours des siècles suivants, et toujours nous trouverions les saints docteurs, les écrivains ecclésiastiques, et les théologiens professant la même foi sur l’inspiration du Nouveau Testament.

3. L’accord unanime des hérétiques ajoute une nouvelle force aux différentes preuves que nous venons de donner. Parmi cette foule innombrable de sectes anciennes et modernes, qui se sont séparées de l’Église fondée par Jésus-Christ, et qui toutes se sont plus ou moins acharnées contre elle, pas une seule ne lui a jamais reproché d’avoir introduit de son chef le dogme de l’inspiration divine, et de s’être écartée en cela des institutions de son divin fondateur. Seulement au ive siècle, les anoméens, pressés par la force des témoignages de saint Paul, qu’on leur opposait, ont prétendu que l’Apôtre avait quelquefois parlé comme homme sans être éclairé par l’Esprit divin. Mais cette misérable défaite, inventée par ces hérétiques en désespoir de cause, a eu le sort qu’elle méritait ; elle a été rejetée comme une nouveauté impie et blasphématoire, et bientôt étouffée sous les anathèmes de toutes les églises chrétiennes[2]. Enfin, toutes les fois qu’il s’est élevé des critiques assez hardis pour combattre cette croyance, ils se sont toujours trouvés en opposition avec le sentiment général. Ainsi Spinosa, aussi bien que Toelner et Semler, ont eu contre eux non-seulement tous les catholiques, mais encore toutes les églises protestantes, tous les Grecs schismatiques et toutes les sectes hérétiques de l’Église orientale ; en un mot, ils se sont

  1. Prœf. moral. in Job.
  2. Voy. Epiph. Hœres. 76