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de l’écriture sainte.

Il est vrai que l’Eglise peut errer sur les faits et dans les matières qui n’appartiennent pas à la religion ; car elle n’est que la dépositaire de la doctrine qu’elle a reçue de Jésus-Christ et de ses apôtres : elle n’a plus de nouvelle révélation authentique et publique ; mais il n’en est pas de même de l’Ecriture sainte, qui, comme nous l’avons déjà observé, a été écrite par l’inspiration de Dieu, pour être une règle infaillible de la vérité et de la foi des chrétiens.

Enfin, il est vrai que Jésus-Christ, la vérité même, est seul infaillible par lui-même ; mais les hommes peuvent recevoir le don de l’infaillibilité par grâce, par inspiration, et par l’assistance spéciale et la direction du Saint-Esprit. Or c’est le cas des apôtres et de tous les autres écrivains sacrés, comme nous l’avons démontré par des preuves dont ces objections ne diminuent en rien ni la force ni la solidité.


QUESTION TROISIÈME.
La simple assistance n’a-t-elle pas suffi aux écrivains sacrés dans certaines parties de leurs ouvrages, et l’inspiration doit-elle s’étendre jusqu’aux mots dont ils se sont servis ?

On s’était borné jusqu’au IXe siècle à soutenir que l’Ecriture sainte était divinement inspirée ; mais Agobard, archevêque de Lyon, qui vivait à cette époque, ayant examiné de plus près la question de l’inspiration, soutint, dans une lettre écrite à un certain Frédégise, que l’Esprit saint n’avait point dicté aux prophètes et aux apôtres les termes et les expressions dont ils s’étaient servis.

En 1586, les pères jésuites Lessius et Hamelius défendirent, dans des thèses soutenues à Louvain, les propositions suivantes :

I. Ut aliquid sit Scriptura sacra, non est necessarium singula ejus verba inspirata esse à Spiritu sancto.

II. Non est necessarium ut singulæ veritates et sententiæ sint imme- diatè à Spiritu sancto ipsi scriptori inspiratæ.

III. Liber aliquis, qualis fortassè est secundus Machabæorum, humanâ industriâ sine assistentià Spiritûs sancti scriptus, si Spiritus sanctus posteà testetur ibi nihil esse falsum, efficitur Scriptura sacra.

Dès l’année suivante et en 1588, les facultés de théologie de Louvain et de Douai censurèrent ces propositions. Les docteurs de Louvain les condamnèrent in globo sur le motif qu’elles semblaient approcher de l’ancienne hérésie des anoméens, qui prétendaient que les prophètes et les apôtres avaient souvent parlé comme des hommes ordinaires : Tres illæ assertiones accedere videntur ad damnatam olim anomæorum opinionem, qui prophetas et apostolos in multis volebant ut homines fuisse locutos ; mais ceux de Douai appliquèrent une censure à chaque