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de l’excellence ou de l’autorité.

composé par l’Esprit saint, s’il ne l’a pas été réellement. Or, on a toujours et généralement entendu par Ecriture sainte un ouvrage composé par l’Esprit saint. Ainsi l’Eglise ne pourra jamais faire qu’un écrivain qui, en composant son livre, n’a été mu que par son seul et propre esprit, ait été cependant mu par l’Esprit saint ; ce qui signifie, en d’autres termes, qu’un ouvrage qui n’a été composé que par une industrie purement humaine ne saurait jamais être la parole de Dieu dans le sens que Jésus-Christ, les apôtres, les pères, et l’Eglise elle-même, ont toujours attaché à cette expression, quand ils l’ont appliquée à l’Ecriture sainte.


DEUXIÈME PROPOSITION.
L’inspiration ne s’étend pas jusqu’aux mots dont les écrivains sacrés se sont servis dans la composition de leurs ouvrages..

Les autorités si nombreuses et si imposantes que nous avons citées dans les deux questions précédentes en faveur de l’inspiration des écrivains de l’Ancien et du Nouveau Testament, ne sont pas assez claires et assez précises sur l’étendue de cette inspiration, pour qu’on puisse prononcer avec certitude qu’elle s’étend ou ne s’étend pas jusqu’aux expressions dont se sont servis les écrivains sacrés. De là les théologiens et les interprètes, divisés comme en deux camps, se sont déclarés les uns pour, les autres contre l’inspiration verbale. Pour nous, quoique fort éloignés de condamner l’opinion contraire, nous regardons comme plus probable que l’inspiration ne s’étend pas jusqu’aux mots, et voici les raisons sur lesquelles nous fondons notre sentiment.

1. On ne serait fondé à admettre l’inspiration verbale qu’autant qu’elle serait nécessaire pour établir la vérité et l’infaillibilité de l’Ecri- ture, et pour prouver qu’elle est la parole de Dieu. Or, l’Ecriture peu avoir ces deux caractères indépendamment de l’inspiration verbale. Il suffit en effet que toutes les pensées en soient inspirées, et que l’Esprit saint ait veillé par un secours spécial à ce que l’écrivain sacré employât les termes convenables pour exprimer exactement les vérités qui lui étaient suggérées. Si toutefois on veut exiger de plus le secours de l’inspiration verbale, il faudra nécessairement dire que les différentes Eglises du monde chrétien n’ont pas la parole de Dieu, puisqu’elles ne possèdent que des versions écrites dans des langues diverses, et par conséquent dans des termes tout autres que ceux qui sont sortis de la plume des auteurs sacrés.

2. La grande différence de style qu’on trouve soit dans les oracles des prophètes, soit dans les écrits des apôtres et des évangélistes, est encore une preuve assez forte contre l’inspiration verbale. Chacun d’eux écrit