Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/245

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Dans l’angoisse des nuits, lentes et sans rayons
D’étoiles, elle errait ; l’arbre au feuillage sombre
Se tordait, grandissait, et ressemblait dans l’ombre
Aux spectres par l’effort de ses contorsions.

La tempête sonore ébranlait sur leur base
Les montagnes, et les brisait avec fracas.
Pour reposer, le soir, ses membres délicats,
La proscrite couchait par terre, dans la vase !

Ses beaux enfants pleuraient. Apollon avait faim,
La petite Diane avait froid, et Latone,
Qu’ils contemplaient d’un œil ingénu qui s’étonne,
Demandait quand ses maux toucheraient à leur fin.

Alors, triste et navrée, elle disait : « Oh ! n’ai-je
Pas encore versé tous les pleurs de mes yeux !
Quand donc luira le jour miséricordieux
Où tu pardonneras, Déesse aux bras de neige ?

Oui, je t’ai grandement blessée en ton orgueil !
Ta colère de reine et d’épouse outragée
Eut raison, je le sais. Mais n’es-tu pas vengée
Suffisamment par mon exil et mon long deuil ? »

La foudre répondait ; la forêt, que secoue
L’âpre bise, agitait ses arbres furieux,
Et les hommes, avec des mots injurieux,
Pour l’en marquer au front lui jetaient de la boue.