Aller au contenu

Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/85

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



Ô robuste fille des âges
Où les dieux vivaient parmi nous,
Au milieu des grands paysages,
Rubens eût baisé vos genoux.

Toujours votre lèvre éloquente
S’ouvre comme un fruit rouge et sain,
De même qu’au temps ou, Bacchante,
Vous suiviez le cruel essaim

De ces créatures divines,
Ivres de vin et de fureur,
Qui bondissaient par les ravines
Et les forêts pleines d’horreur.

Aujourd’hui calme et nonchalante,
Loin de vos bois qui sont coupés,
Votre ongle frémissant se plante
Sur le velours des canapés.

La mâle tigresse est domptée ;
Sa voix est douce ; nous pouvons
Prendre sa main fine et gantée,
Qui connaît l’emploi des savons.

Mais pour éclairer les alcôves,
Vos grands yeux n’en jettent pas moins
Des lueurs brûlantes et fauves
Qui font reculer les témoins.