beau de tout notre amour le cher coin de terre qui a déroulé ses panoramas sous nos premiers regards. Et maintenant, lorsque se déploient à nos yeux les toiles anciennes, où les teintes ont gardé leur riche coloris, nous courbons le front sous le flot de nos pensées, vague montante qui submerge le cœur dans une enveloppante caresse.
Mon Dieu ! pourquoi faut-il sans cesse émietter le meilleur de sa vie et laisser ainsi des parcelles de son cœur le long de la route ? — Cela ne meurt pas !… Lorsque nous foulons les sentiers jadis parcourus, nous écoutons la voix des déchirements murmurer : Te souviens-tu ?
Si l’on se souvient ? Mais peut-on oublier que sous le sol natal, dans un blanc linceul est enveloppée la chère créature du nom de Maman, qui a dormi avant qu’on ne s’éveille, nous cachant à jamais l’éclat de ses chers yeux, voilant sous la mousseline blanche la tendresse de son sourire, en gardant pour des anges les caresses, qui font pleurer sur terre les petits êtres délaissés. Et combien elle est appelée dans des sanglots, cette blanche vision si vite évanouie ! Elle revient dans des rêves, elle arrive doucement, se penche sur le petit lit, et de caresses humides de larmes elle couvre le cher visage. Son enfant en sourit… et ce doit être là le meilleur du ciel des mères que ce rayon né d’un baiser ! C’est dans ces nuits du paradis que l’enfant apprend à aimer sa mère, et le soir, en posant sa blonde tête sur l’oreiller, il sourit d’avance, dans un appel de toute son âme naïve : Oh ! viens, petite maman !… Elle arrive… Comme elle est jolie, toute vêtue de blanc, avec cette grâce diaphane qui n’appartient qu’aux êtres aériens.
Petite mère, petite mère, embrasse vite ton enfant, les nuits sont courtes et bientôt lorsqu’il aura vieilli, tu ne descendras plus baiser ainsi ses boucles blondes.
— Et lorsque l’on a rêvé d’elle, le matin, la chambrette est bien sombre, le premier regard est voilé de larmes… on ne pleure jamais assez sa mère ! Hélas ! pourquoi savoir ce nom, qui déchire, qui meurtrit, qui broie, qui ensanglante !
N’a-t-il pas une cruauté inouïe ce mot qui meurt aux lèvres, dans un besoin de le dire, même en un murmure. Le cœur vient aussitôt le reprendre, fleur d’amour qu’il faut mettre sur l’autel drapé de deuil où est enseveli le plus cher de notre vie… la mère !
Parti, aussi, l’être noble et grand dont on est si fière d’être la fille. Oh ! son père, l’aimer, oui, mais l’admirer comme l’homme supérieur qui ne saurait faillir aux grands principes d’honneur, de devoir. Passe la silhouette de l’aimé ; il est grand, il est beau, il est bon, dans ses yeux la caresse du paternel amour, sur ses lèvres, le