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Page:Gobineau - Les Pléiades, 1874.djvu/189

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CHAPITRE SIXIÈME

Henry de Gennevilliers, l’ami intime et le mentor de Laudon, était d’un caractère fort honorable. Il appartenait au parti conservateur ; en outre, il était libéral et attachait une importance extrême, comme tous les gens sages, à pouvoir dire à chaque contradicteur, avec un sourire attirant : « Nous sommes moins loin l’un de l’autre que vous ne semblez le croire » De cette façon, il avait des affinités avec les légitimistes ; il n’en avait pas moins avec les démocrates, et se balançait ainsi en inclinant tour à tour de tous les côtés, et cherchant à donner un peu raison à tout le monde.

Il passait sa vie à chercher la solution des problèmes sociaux. Il s’inquiétait de statistique, d’économie politique, d’institutions charitables, en faveur desquelles il dépensait beaucoup. Il organisait des sociétés d’ouvriers pour l’instruction des basses classes, favorisait les lavoirs, les ouvroirs, les caisses d’épargne. Il était un membre actif de la Société de Saint-Vincent de Paul et de celle de Saint-François Régis pour la régularisation des mariages ; mais surtout, il prêchait la transformation morale des prolétaires qui, à l’aide de saines doctrines, de renoncement et d’abnégation résultant de principes religieux aussi solides qu’éclairés, devaient, un jour, devenir sobres, chastes, patients, désintéressés, tout à fait désabusés sur les bals publics et