Aller au contenu

Page:Gobineau - Mademoiselle Irnois - 1920.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Voilà ce que M. Irnois et les trois femmes se demandaient avidement des yeux.

— “Monsieur, reprit Mme Irnois, vous n’êtes pas, je crois, bien informé de ce qui touche notre pauvre enfant. Elle est contrefaite, je dois vous le dire.”

— “Ah ! Madame, quel blasphème proférez-vous là ? s’écria Cabarot qui vit se peindre dans son imagination le profil d’une bosse. Je suis bien certain que vous exagérez quelque léger défaut tout à fait insignifiant. D’ailleurs, serait-il vrai que mademoiselle votre fille pût manquer absolument de beauté, que sont les fragiles avantages des charmes physiques dans la vie du ménage ? Ses grâces et son esprit…”

— “Sans doute, dit M. Irnois, mais elle ne dit jamais mot.”

— “Les vertus dont elle est douée, s’écria le comte Cabarot avec un redoublement d’enthousiasme, oui, ses vertus, voilà ce qui m’attache à elle ! Croyez-moi, je n’ai jamais ambitionné qu’une épouse vertueuse et sage ! Mais ne pourrais-je voir la belle et touchante Emmelina ? Ne me sera-t-il pas permis de déposer à ses pieds mêmes l’hommage de mon cœur ? Vous comprenez mon impatience et…”

Une crainte subite vint serrer le cœur de Mme Irnois :

— “Je vous avertirai d’une chose”, dit-elle.

— “Et de laquelle ?” s’écria le comte prêt à souscrire à tout, à ne se laisser arrêter par aucune difficulté, à accepter toutes les conditions, au moins provisoirement.

— “Je vous prie de remarquer que ma fille est une